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Corinne Denuet de la SPL Atlantia : « Je fonctionne en mode start-up »

Directrice générale de la SPL* Atlantia (18 salariés, 1,8 M€ de CA) depuis 2014, Corinne Denuet a su imprimer sa marque au palais des congrès de La Baule. Entretien avec une chef d’entreprise qui place au plus haut niveau la culture de l’accueil.

Corinne Denuet, directrice générale d'Atlantia de La Baule. Crédit JF Couty - Photo Bleu Marine

Quel a été votre parcours avant la SPL Atlantia ? De quelle manière vos expériences ont-elles nourrit votre activité d’aujourd’hui ?

Corinne Denuet : J’ai eu un parcours commercial pendant dix ans dans la grande distribution, une expérience très formatrice qui m’a appris que tout était possible. Je travaillais pour une entreprise américaine. Ils respectaient beaucoup la personnalité et faisaient en sorte que vos traits de caractère servent la performance de l’entreprise. J’y ai aussi appris la bienveillance, le fait que dans les affaires on peut se faire confiance, en se basant sur la notion de « deal ».

J’ai poursuivi avec une expérience dans un groupe hôtelier de luxe qui mettait au plus haut niveau les notions de rigueur et d’hospitalité. Chaque personne qui était recrutée l’était sur sa gentillesse, son empathie, son sens de l’accueil et de l’écoute des besoins des clients, en particulier l’écoute du silence pour anticiper leurs besoins afin que leur séjour devienne une expérience. 

J’ai ensuite travaillé pour la Cité des Congrès de Nantes de 2002 à 2013, à une époque où la volonté était de développer l’attractivité de la ville. Quand je suis arrivée, elle n’était alors pas sur l’échiquier international, le Voyage à Nantes n’existait pas… Tout était à faire pour développer l’attractivité. 

Et puis, à un moment donné, j’ai eu envie de me retrouver dans un territoire en format écrin. Atlantia était en cours de rénovation et il y avait l’ambition de faire revenir La Baule dans le jeu international.

 

Quels ont été vos axes de travail ?

Nous avons revu le modèle économique. Je me suis dit : il y a des choses à faire pour organiser l’économie touristique autour de nouveaux événements professionnels et développer cette activité-là, en particulier en période creuse, pour que les hôteliers, les commerçants aient un trafic régulier. Nous avons travaillé sur des formats d’événements suffisamment denses pour que cela profite à un maximum d’acteurs locaux. Aujourd’hui, on accueille des événements de 150 à 600 personnes, avec la volonté de ne pas être concurrent de nos partenaires. La taille moyenne d’un événement est de 450 participants, sur trois jours, avec une audience nationale et internationale. 

Parallèlement, nous avons cherché à attirer de grands artistes. On a doublé le nombre de spectacles avec des artistes à forte notoriété. Une fois qu’ils ont goûté ou re-goûté à l’art de vivre baulois, ils sont séduits ! 

Aujourd’hui, on accueille 30 000 spectateurs par an, soit 300 jours d’exploitation, tant sur des événements professionnels que grand public. 

 

Quels sont les atouts d’Atlantia ?

Il existe 230 palais des congrès en France, sans compter les multiples lieux événementiels : l’offre est pléthorique et la concurrence très rude. Les organisateurs nous comparent avec Le Touquet, Cannes, Deauville ou encore Saint-Malo. C’est dans ce cadre que nous avons créé en 2016 la marque La Baule Événement et la signature « Ça c’est La Baule », parce qu’Atlantia, ça ne parle pas à Paris. On vend d’abord la destination, un spot dont l’ADN est l’art de vivre. La Baule est une cité balnéaire qui vit toute l’année, comme il y en a peu sur l’arc Atlantique. On a tout ici : on est à 3h de Paris et une fois sur place, on peut tout faire à pied. On est aussi équipé de la fibre optique, avec la promesse de pouvoir travailler les pieds dans l’eau. Ce qui fait la différence aussi, c’est notre expertise d’un service premium qui mêle rigueur et gentillesse.

 

Quelle place occupe Atlantia dans la stratégie d’attractivité du territoire ?

Un palais des congrès, c’est un outil d’attractivité et d’animation du territoire. Et mon ambition, c’est que l’ensemble de la presqu’île en profite. 

Nous avons la chance d’avoir un monde associatif extrêmement dynamique. Je m’appuie sur lui pour accueillir les grands formats. On organise des soirées événementielles pour faire découvrir les produits locaux, on travaille avec les commerçants… Ensemble, on a bâti une alliance. C’est le complément de l’attractivité du territoire et l’un ne va pas sans l’autre.

C’est ce qui nous a permis, par exemple, d’accueillir en mai 2018 les deuxièmes Jeux mondiaux du sport d’entreprise avec 26 disciplines, 5000 athlètes et une quarantaine de nationalités. Tout cela a été possible grâce à l’implication du tissu sportif et associatif local.

 

Un palais des congrès a un fonctionnement particulier…

J’interviens comme gestionnaire d’un site événementiel, que je considère même plutôt comme un lieu de vie, avec cette particularité que la gouvernance est portée par des élus. Nous avons une délégation de service public. On doit donc être en traduction d’une politique publique, en cohérence avec le territoire. Mais on est 16 000 habitants à La Baule et la logique de pouvoir n’existe pas ici. 

 

Comment travaillez-vous ?

Atlantia, c’est 18 collaborateurs, mais ce sont aussi 400 fournisseurs et une centaine d’intermittents et techniciens. Je fonctionne en mode start-up, avec une hiérarchie liée au niveau de responsabilité et à l’engagement de chacun. On ne peut pas standardiser, on ne fait que du sur-mesure et ce que je demande à mes équipes, c’est d’avoir un supplément d’âme afin non seulement de répondre aux exigences de nos clients, mais d’aller au-delà. Même si on prépare un projet pendant deux ans, il y a toujours des demandes de dernière minute. Cela demande de l’agilité et de la réactivité. On m’appelle d’ailleurs le couteau-suisse dans la profession ! On a une problématique ? On l’analyse, on envisage plusieurs solutions, on arbitre, on réalise… et on évalue. 

La gestion d’un palais des congrès implique aussi de réussir à fédérer tous les acteurs locaux, quels qu’ils soient, bien connaître le territoire, son histoire et ceux qui ont envie de faire, puis expliquer un projet, arriver à convaincre pour impliquer. C’est un métier où l’on doit être capable d’embarquer, de faire rêver et c’est un jeu de rencontres. 

Il faut aussi être capable de cibler les manifestations en lien avec l’identité du territoire, des événements qui, par leur ambiance, leur contenu, vont développer l’ancrage territorial. Là en ce moment, on travaille beaucoup sur la filière de l’industrie marine, par exemple. On collabore d’ailleurs beaucoup avec Saint-Nazaire. L’industrie navale et le musée Escal’Atlantic font partie intégrante de notre offre, qui va de Saint-Nazaire à la Turballe. On veut que les gens respirent la presqu’île !

 

* Société publique locale