Couverture du journal du 19/04/2024 Le nouveau magazine

Nicolas ROHR, co-fondateur de FAGUO

70 salariés, 13 M€ de CA, en progression de 20% : en un peu plus de dix ans, la marque de mode Faguo a su imposer sa différence dans un secteur ultra-concurrentiel. Co-fondateur avec Frédéric Mugnier de cette entreprise implantée depuis juillet à Nantes, Nicolas Rohr est également ambassadeur du Salon des Entrepreneurs. Entretien avec un dirigeant engagé.

Nicolas ROHR et Frédéric MUGNIER, co-fondateurs et dirigeants de FAGUO. Photo : Benjamin Lachenal

« Tout est à réinventer ! »

Vous êtes ambassadeur du Salon des Entrepreneurs de Nantes(1). Quel message souhaitez-vous faire passer aux visiteurs ?

Je voudrais leur dire qu’on est dans une très belle période pour entreprendre : tout est à réinventer ! Et qu’il ne faut pas non plus attendre l’idée du siècle pour se lancer : tout le monde peut créer un Faguo.

Aujourd’hui, on est beaucoup dans l’emphase, ceux qui viennent témoigner ont tous réussi.

Mais moi par exemple, je n’étais pas très bon élève, j’ai fait une école de commerce qui n’était pas la plus réputée et quand on a créé Faguo, on n’avait même pas rêvé de vendre toutes nos paires de sneakers.

Je pense qu’il ne faut pas avoir trop d’ambition au début. C’est bien d’avoir une finalité en tête, mais il faut aussi prévoir des étapes, ne serait-ce que pour pouvoir se féliciter à mesure !

Aujourd’hui, l’entrepreneuriat s’est démocratisé, mais à notre époque c’était encore un gros mot. Quand on a annoncé notre projet à nos parents, on était encore étudiants et on s’est fait éclater… On pensait alors qu’on était vraiment seuls. Aujourd’hui, ça fait toujours peur d’entreprendre, mais les porteurs de projet ne sont plus isolés. Et je suis persuadé qu’une bonne idée finit toujours par trouver de l’argent.

Dans le secteur de la mode, Faguo se distingue par son engagement en faveur de la planète…

Notre mission est d’engager notre génération contre le réchau­ffement climatique au travers du prisme d’une marque de mode. Pour cela, on s’appuie sur un triptyque : on réalise un bilan carbone tous les cinq ans, on mène un plan d’actions quinquennal pour réduire nos émissions, et on compense tout ce qui reste avec la plantation d’arbres.

Ainsi, avant même de déposer le nom de la marque à l’INPI, on a voulu avec Frédéric connaître l’impact de notre activité sur la planète en réalisant un bilan carbone via la Fondation Goodplanet.

Parallèlement, nous réduisons nos émissions de CO2 en agissant sur toutes les facettes de nos métiers. Nous avons réduit les émissions moyennes d’un produit en passant de 9 kg équivalent de CO2 en 2010 à 6 kg en 2015. Et nous avons pour objectif d’atteindre 4 kg en 2020.

Enfin, en plantant un arbre pour chaque produit acheté, nous compensons nos émissions de CO2 et nous allons même au-delà : un arbre compense 600 fois chacun de nos produits. On verse ainsi chaque année 2,5% de notre chiffre d’affaires pour la plantation d’arbres aux essences multiples.

Concrètement, de quelle manière agissez-vous pour réduire vos émissions de CO2 ?

Nous avons emménagé à Nantes dans des locaux très faiblement émetteurs (classés catégorie A en termes d’émissions de gaz à effet de serre, NDLR), nous utilisons de l’énergie recyclée et des bornes de recyclage sont disponibles dans nos boutiques. On travaille également sur des bureaux recyclés et recyclables.

La vie d’équipe est à l’origine de 15% de nos émissions de CO2, alors on a supprimé les poubelles individuelles : c’est amusant de voir comme on jette beaucoup moins quand on doit aller jeter ses déchets plus loin… Par ailleurs, on trie nos déchets avec Solution Recyclage pour être certains qu’ils soient vraiment triés jusqu’au bout et on a une politique zéro plastique.

Le 21 novembre(1), vous allez intervenir au grand débat sur le « positive business ». Comment le définissez-vous ?

Pour nous, ce n’est pas du « positive business », mais du « normal business ». Ça devrait être dans les prérequis d’une entreprise d’agir pour la planète… D’ailleurs, aujourd’hui, on n’est pas extraordinaire, beaucoup d’autres sont engagés et c’est tant mieux ! Il faut réenchanter les choses autant que possible, mettre du bon dans ce qu’on fait.

Pour autant, on ne veut pas s’ériger en « monsieur parfait »,
on n’a pas à être moralisateurs. On a voulu s’engager dans une mode responsable, mais la route est longue et on trouve d’ailleurs que ça ne va pas assez vite. Notre objectif est par exemple d’arriver à ce que 100% de la collection soit faite à partir de matériaux recyclés. Aujourd’hui, on est à 10% et cet été on sera à 45%. On agit en conscience, à notre niveau. On ne se définit pas comme une entreprise à mission(2), mais on est en train de voir de quelle manière on pourrait inclure cette mission dans nos statuts.

(1) De 11h à 12h30, à l’auditorium 450 (niveau 1) de la Cité des Congrès.

(2) L’entreprise à mission intègre dans ses statuts la poursuite d’un
objectif d’intérêt général (social, environnemental) en plus de la dimension économique.

Les 70 collaborateurs de Faguo ont une moyenne d’âge de 28 ans. L’engagement de l’entreprise en faveur de la planète constitue pour eux un élément fort de leur implication. Photo : FAGUO